La Croix-Rouge française se mobilise pour bâtir une société plus juste et plus résiliente
Progression dans le chapitre
Stratégie de préparation, de réponse et de relèvement face aux catastrophes
La crise que nous traversons a révélé un manque de préparation généralisé de notre société pour faire face à l’urgence. Elle nous a fait prendre conscience de notre vulnérabilité (voir la tribune « Quand la vague se retirera » écrite par le Professeur Jean-Jacques Eledjam, président de la Croix-Rouge française). Cette crise présage en outre d’autres chocs sanitaires dus aux changements climatiques : c’est le plus grand défi de notre siècle. Dans le cadre de son nouveau projet associatif, la Croix-Rouge française souhaite répondre à cette double inégalité sociale et environnementale avec la mise en place d’une véritable stratégie de préparation, de réponse et de relèvement face aux catastrophes (PRRC).
Grande précarité et nouvelles solidarités
Au-delà de l’aspect sanitaire, la crise a exacerbé les inégalités sociales et territoriales des populations en proie à de multiples facteurs de vulnérabilité, qui doivent ainsi faire face à d’importantes difficultés pour se soigner, se nourrir, se loger. Encore plus qu’avant, l’actualité confirme la nécessité de répondre à l’état d’urgence sociale et sanitaire par des actions pertinentes et efficaces. Elle nous oblige à inventer de nouvelles solidarités pour protéger les plus vulnérables, à unir nos énergies pour porter des revendications à grande échelle (voir encadré 1). Dans cette perspective, le rôle des structures associatives et humanitaires sera déterminant.
Bâtir la résilience du grand âge et la société de la longévité
En mettant l’accent sur la vulnérabilité des personnes âgées, l’épidémie de Covid-19 a confirmé les besoins grandissants de ces publics en termes d’accompagnement sur les plans sanitaire, médico-social et psychosocial. Engagée depuis longtemps dans une réflexion pour promouvoir une société de la longévité (voir encadré 2), la Croix-Rouge française réaffirme aujourd’hui l’urgence de traiter cette question et appelle à remettre la Loi Grand Âge et Autonomie à l’agenda des priorités politiques.
Modèle d'économie sociale et solidaire
À la fois pourvoyeur de solutions et impacté par la crise actuelle, le secteur de l’économie sociale et solidaire (ESS) doit incarner l’économie de demain tout en permettant la transformation sociale et écologique. À la croisée des chemins entre le monde associatif et l’entrepreneuriat social, le modèle de la Croix-Rouge française s’inscrit totalement dans cette démarche et constitue la preuve qu’une autre manière de faire est possible. Membre de la Coalition 10 %1, la Croix-Rouge française a co-signé une tribune intitulée « Pas de ‘monde d’après’ sans l’union de nos forces », publiée le 23 avril dans le quotidien Les Échos. Une prise de parole qui sera suivie par d’autres actions.
1 Cette coalition est portée notamment par Christophe Itier, haut-commissaire à l’Economie sociale et solidaire et à l’Innovation sociale.
Démarche inter-associative sur la lutte contre la précarité alimentaire auprès de l’Union européenne
Alors que l’Europe est confrontée à une vague de pauvreté sans précédent aggravée par l’épidémie de Covid-19 et à une augmentation de 20 à 30 % des besoins alimentaires, la Croix-Rouge française, la Fédération Française des Banques Alimentaires, les Restaurants du Cœur et le Secours Populaire ont lancé un appel aux institutions européennes et aux chefs d’État et de gouvernement réunis pour le Conseil européen du 19 juin. Vingt-sept associations de solidarité issues de dix-huit pays – dont les Croix-Rouge d’Autriche, Belgique, Bulgarie, Chypre, Espagne, Finlande, France, Hongrie, Irlande, Italie, Lettonie, Pologne et le Bureau européen – ont rejoint cet appel à mobilisation pour demander à l’Union européenne le déblocage d’une enveloppe financière européenne exceptionnelle et une réponse durable à la lutte contre la pauvreté dans le cadre financier pluriannuel 2021 – 2027.
Contribution à la mission de Jérôme Guedj sur l’isolement social
Membre de la mission pilotée par l’ex-député socialiste Jérôme Guedj sur la lutte contre l’isolement social des personnes fragiles, installée par le ministre des Solidarités et de la Santé Olivier Véran durant la période de confinement, la Croix-Rouge française a contribué activement à la rédaction des recommandations du premier rapport, conduisant à un plan de mobilisation national contre l’isolement.
Parmi les recommandations mises en œuvre :
– Le renforcement du numéro vert national d’écoute de la Croix Rouge avec une attention spécifique pour les personnes âgées, fragiles et isolées : en partenariat avec la Croix-Rouge française, que le ministre a remerciée pour sa réactivité, et avec l’appui d’entreprises et mutuelles qui mobiliseront à titre gracieux des écoutants, la plateforme assurera un soutien psychologique et d’orientation pour ces publics. Il s’agit d’un soutien et d’une amplification durable du dispositif « Croix Rouge chez vous » lancé le 20 mars.
– La diffusion des bonnes pratiques et des initiatives locales qui luttent contre l’isolement, grâce à une plateforme hébergée par le site du ministère des Solidarités et de la Santé : rompre-isolement-aines.gouv.fr, un site que la Croix-Rouge française a abondé.
– L’accès à un soutien psychologique et entre pairs, au coaching, au partage de bonnes pratiques, à la capitalisation de l’expertise, de l’expérience et de la réflexion éthique aux professionnels du soin et de l’accompagnement tel que l’a initié Entraide, une plateforme d’urgence dédiée au partage du questionnement et des bonnes pratiques face aux enjeux humains et organisationnels auxquels sont confrontés les professionnels du soin, de l’âge et du handicap, développée par Croix-Rouge française, le « 21 », son accélérateur d’innovation sociale, et le Cercle Vulnérabilités & Société, en lien avec la start-up Arbitryum, avec le concours du Comité stratégique du conseil de la CNSA et de l’Espace éthique Ile-de-France.
« Inventons le monde d’après »
La Croix-Rouge française et WWF France se sont associés à Make.org et au Groupe SOS, en partenariat avec Unis-Cité et le Mouvement UP, pour lancer une grande consultation citoyenne – « Inventons le monde d’après » – qui s’est déroulée du 11 avril au 25 mai 2020.
L’objectif ? Inviter les Français à formuler des propositions pour changer nos modèles de société et construire ensemble le monde de l’après-crise. Le coup d’envoi de cette consultation a été donné les samedi 11 et dimanche 12 avril, à l’occasion du festival 100% virtuel « L’Académie du monde d’après » (retransmis sur YouTube et Facebook), qui a rassemblé 250 personnalités, des citoyens engagés, artistes, intellectuels, soignants…
Au total, ce sont plus de 165 000 personnes qui ont participé et formulé 20 000 propositions – le plus grand nombre jamais recueilli dans le cadre d’une consultation Make.org.
Parmi les principaux enseignements qui ont émergé, une place importante est réservée par les citoyens à l’action écologique (limiter les déchets, végétaliser les villes, favoriser les mobilités non polluantes, sauvegarder la biodiversité ou augmenter la durée de vie des produits) tandis que les pouvoirs publics et les entreprises sont invités à agir dans plus de deux-tiers des propositions.
D’autres consensus citoyens émergent également pour l’après-crise : relocaliser certaines productions industrielles, revaloriser les métiers essentiels pour la nation, consommer plus local, protéger notre système de santé, etc.
Pour en savoir plus :
« La résilience des droits humains pour répondre à la pandémie »
Sollicitée par Maître Pettiti, avocat au Barreau de Paris et Secrétaire général de l’Institut des droits de l’Homme, la Croix-Rouge française propose une contribution écrite sur les questions internationales en lien avec les mesures de confinement généralisé et les droits fondamentaux. Extrait de cette contribution intitulée « La résilience des droits humains pour répondre à la pandémie »1.
La Croix-Rouge française a adapté ses activités à la nouvelle réalité du Covid-19 en intégrant ce facteur dans ses missions. Cette adaptation traduit notre volonté de garantir les droits humains. Notamment, le droit de jouir du meilleur état de santé physique et mentale, consacré par l’article 12 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Dans cette optique, les équipes ont coopéré avec différents acteurs pour faciliter un accès à tous au droit à la santé, à un droit à l’alimentation, au logement, à l’éducation, à la non-discrimination, à l’accès à l’information et à la participation.
Notre appartenance au Mouvement de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge nous incite à coopérer, à l’échelle mondiale, avec les 192 Croix-Rouge et Croissant-Rouge. En lien avec notre mandat statutaire et notre rôle d’auxiliaire des pouvoirs publics, nous assurons également la promotion et la diffusion du droit international humanitaire (DIH). À travers cette mission, nous souhaitons souligner que l’absence de volonté de respecter le droit international humanitaire et les droits humains par les États et les belligérants amène inéluctablement à l’extrême vulnérabilité des populations affectées par le Covid-19 dans les situations de crises, de violences et de conflits armés.
La politique de santé publique en réponse à la pandémie et un respect des protections juridiques fondamentales n’iront pas l’une sans l’autre. Dans cette perspective, la Croix-Rouge française souhaite développer cinq règles de droit applicables à la pandémie de Covid-19, que nous devons tous bien garder à l’esprit lorsqu’une pandémie frappe un pays en temps de paix et de guerre.
Ces cinq règles sont les suivantes : la protection du personnel médical, des établissements et des moyens de transport sanitaires ; la protection des personnes particulièrement à risque ; les enfants et le droit à l’éducation ; l’accès à l’eau et l’assainissement ; et, enfin, la circulation des secours et la logistique humanitaire.
1 La contribution écrite de la Croix-Rouge française doit être publiée dans le rapport intitulé « Confinement forcé sur tout le territoire national et modalités d’application : des mesures disproportionnées dans une société démocratique ? », réalisé sous l’égide de l’Institut des droits de l’Homme du Barreau de Paris (IDHBP) et de l’Institut des droits de l’Homme des avocat(e)s européen(e)s (IDHAE).